mardi 13 janvier 2009

Salauds de pauvres!

Par UTOPIA Saint-Ouen l'Aumône le mercredi, février 13 2008, 11:59. Lien

C’était à la fin du journal télévisé, sur je ne sais plus quelle chaîne privée ou publique… Un présentateur, la mine gourmande, qui venait juste de remplir notre gamelle de son lot habituel d’informations insignifiantes ou horribles, prit soudain un air grave pour nous signifier que tout ce que nous avions vu et entendu au cours de ce journal, était du pipi de chat à côté de la gâterie qu’il nous avait gardée pour le dessert.
On se demandait déjà quel nouveau coup tordu avait bien pu germer dans les cerveaux malades de Bush, Poutine ou Sarkozy, lorsque, transportés aux USA par la grâce d’une envoyée spéciale frétillante, on vit deux pauvres bougres qui se dandinaient mal à l’aise, menottes aux poignets, face à une horde de journalistes déchaînés.
Les deux hommes, plutôt âgés, pauvrement vêtus et dont le visage trahissait une vie de détresse, s’étaient rendus coupables d’un crime monstrueux digne du tribunal de Nuremberg: ils avaient, ces deux salopiots, tenté de toucher la prime d’invalidité de 300 dollars d’un troisième larron dont ils partageaient la vie de misère. Ils s’étaient d’abord présenté seuls au guichet des services sociaux, en prétextant une légère indisposition du bénéficiaire. Le préposé méfiant – 300 dollars, même au cours actuel du billet vert, c’est une somme – les avait envoyés balader. Sans doute faut-il louer la vigilance de cet honnête serviteur de l’état américain car les deux loustics cachaient en fait un gros secret. Leur vieux pote était mort de sa bonne mort, la veille au soir, et les 300 dollars guettés chaque mois par le trio leur passaient, à un jour près, sous le nez… c’était trop bête !
À cet instant du reportage, le suspense était à son comble.
Qu’avaient donc inventé ces deux outrecuidantes canailles pour s’emparer du magot ? Le monde entier allait être témoin de l’incroyable âpreté au gain de ces salauds de pauvres ! Ceux-ci, sans doute inspirés par le Diable, ne trouvèrent rien de mieux que de revenir avec le cadavre dans une chaise roulante jusqu’au bureau d’aide sociale.Aussi finement maquillé que le candidat Sarkozy à l’élection présidentielle, chaudement emmitouflé dans un peignoir, coiffé d’un bonnet de nuit et le nez chaussé de lunettes de soleil, notre cadavre était fin prêt à subir son ultime examen de passage…Grâce au ciel, il en fallait plus pour tromper la vigilance de notre fonctionnaire d’élite, assisté pour la circonstance d’un renfort fourni de policiers, de journalistes, de photographes et de cameramen. Prié de décliner son identité, le cadavre se contenta de glisser sur le côté en découvrant une cuisse maigre et une zézette fripée.
Nos deux compères tentèrent alors un repli stratégique, rapidement stoppé par des policiers bien nourris et dans la fleur de l’âge…Force restait à la loi : les 300 dollars pouvaient prendre le chemin de l’Irak pour soutenir l’effort de guerre américain.Je ne saurais dire pourquoi, mais de toutes les informations insignifiantes ou horribles dont on nous avait gavés ce jour-là, celle-ci me rendit aussi triste que celle du chômeur français mort de froid dans sa voiture, pour ne pas avoir osé avouer à sa famille qu’il avait perdu son job de veilleur de nuit.

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